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Good vibrations

Good vibrations

Good vibrations, 1966, les Beach Boys, écouté en studio en 2017 par Steven Cox.  

Avec Good Vibrations, l’artiste présente sa dernière série de peintures à la galerie Jérôme Pauchant. Promesse d’un contraste poétique, Steven Cox laisse à l’œil le plaisir de découvrir un jeu de textures, au rythme d’une vibration picturale. Sous certains aspects, les couleurs jaillissent et forment les accords chromatiques de ce qui ne semblait être qu’une partition. Mais tout n’est pas ce que l’on croit. Il faut s’approcher, se déplacer pour mieux expérimenter la matière, la profondeur et la structure des peintures de Steven Cox. 

L’expérimentation débute par celle de l’artiste, créant l’objet lui permettant de creuser les lignes. Après une période de tests, les outils du quotidien tel que le peigne à colle, une fois détourné, lui permet grâce à ses crans, de donner un ordre à l’acrylique, épaisse mais malléable. Les rayures se répètent verticalement, au même titre que le geste créant la profondeur. Couche sur couche, l’objet transfiguré de son usage ordinaire, du banal, permet à Steven Cox d’entamer la matière. La qualité esthétique et picturale se révèle et s’accentue lorsque la couleur s’appose et se répète dans le geste, elle aussi, par couches sur la surface.

La peinture de Steven Cox requiert une lecture à plusieurs strates. Elle se veut double. L’œuvre ne semble pas s’achever et se figer. C’est à l’œil de lutter, de se détourner de ce qui est observé. Un jeu de perception est alors à entreprendre au delà de la surface. Ce qui semblait lisse et monochrome laisse place à la variation du Color Field sous son meilleur profil. La couleur contraste et métamorphose la matière picturale, jouant sur la texture presque devenue velours. Steven Cox s’attache à la notion d’expérimentation lorsque sa peinture demande une perpétuelle expérience.  Ce dualisme reprend la durée du processus ici affiné et perfectionné par l’artiste car intense et long. L’expérience pour l’œil se veut plus immédiate. Le geste de l’artiste submerge ainsi le regard et le déséquilibre. À l’image de la dualité des rayures, tout se dédouble, les lignes, les couches, les couleurs, la matière, invitant à un trompe l’œil.

Là où l’illusion devient langage, les rayures tentent a priori de faire signe selon leur perspective. Dans Good Vibrations, l’effet d’optique et sa répétition référencent l’Op art. Cependant, l’hommage ne demeure qu’apparence. Tandis que les œuvres des années 1960 se distinguent par leurs surfaces lisses et graphiques utilisant les outils classiques, la peinture contemporaine, ici, s’abstrait du processus et style traditionnel. Les outils de l’ordinaire ne trouvaient par leur place dans le parachèvement du processus créatif de l’Op art. Aussi, Steven Cox se joue de leur utilité habituelle pour permettre l’œuvre. Le piège se construit dans la surface simple et verticale de la série Good Vibrations. Les toiles de Steven Cox révèlent à l’œil curieux, une délicatesse l’éloignant de la tradition du motif pour faire naître chez le regardeur une expérience de l’ordre de la matière.  

L’œil éprouve le temps de visualisation du motif, les superpositions. Le processus créatif s’inscrit par sa temporalité dans une certaine complexité. Visuellement le contraste laisse transparaitre la structure exacte. Cependant,  une part de hasard arrête le regard, interroge le mouvement. Une « erreur » brise la répétition, rompant l’illusion d’optique.  Celle-ci sublime le rythme et le rend humain. Les rayures dévient et se déforment creusant l’aspect dimensionnel, révélant le geste, celui de l’artiste. Good vibrations unie l’expérience de l’action, celle du mouvement, de sa répétition, de sa durée mais aussi l’expérience par le regard. La double image des peintures de Steven Cox se joue de nous par sa profondeur et sa propre temporalité, relevant le goût de l’artiste sur l’ambigüité de l’illusion picturale. 

Fiona Vilmer

Good vibrations